PURORESU À KUMAMOTO PAR ISMAËL MÉZIANE

PURORESU À KUMAMOTO PAR ISMAËL MÉZIANE

LE COLORIAGE DE KUMAMOTO ET DU CATCH NIPPON

Pour fêter les 10 ans de l’amitié franco-japonaise entre Aix-en-Provence et la ville de Kumamoto, Ismaël Méziane imagine une fresque à colorier de la cité qui a vu naître le mangaka Eiichirō Oda (One Piece). En fan absolu du catch nippon (que l’on appelle puroresu en japonais), il en profite pour réaliser un journal collector autour de ses plus fidèles représentants, dont le légendaire Antonio Inoki. L’occasion de revenir avec Ismaël sur cette passion considérée, au pays du Soleil-Levant, comme un véritable sport.

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QUESTIONS-RÉPONSES

BD-AIX : Kumamoto et Aix-en-Provence sont amies depuis longtemps. De quoi t’es-tu inspiré pour imaginer le coloriage de la ville japonaise ?

ISMAËL MÉZIANE : La scène que j’ai dessinée se passe au parc Suizenji de Kumamoto. J’y ai ajouté l’emblématique château de la ville ainsi que deux des nombreuses statues de One Piece qui parsèment la ville. J’ai aussi reproduit dans la fresque la célèbre vague d’Hokusaï. Mon but était de ramener un peu du Japon et beaucoup de Kumamoto à Aix-en-Provence afin d’honorer l’amitié entre nos deux villes.

BD-AIX : On y découvre aussi des catcheurs. D’où te vient cette passion pour le catch nippon qui n’est pas très connu en France ?

I.M. : Je regardais le catch avec mon grand-père, donc j’imagine que ça commence par là. La force du catch nippon c’est que tout est dit dans le match. Durant les combats, les catcheurs racontent une histoire, qui peut être épique, voire aussi, par moment, très drôle. Le dépassement de soi y est glorifié. C’est cette dimension, je crois, qui m’a le plus fasciné et que je retrouve dans les mangas que j’aime tant.

Coloriage de la fresque "Puroresu à Kumamoto" durant l'événement C'est Sud
Coloriage de la fresque "Puroresu à Kumamoto" durant l'événement C'est Sud

BD-AIX : Y a-t-il une différence entre le catch japonais et les autres catchs ?

I.M. : Le catch japonais est très vaste. Il y en a pour tous les goûts. Du comique, du brutal, de l’acrobatique, du dramatique, et même des choses plus folkloriques. Dans les années 70, 80 et 90, il y avait des tonnes de parutions hebdomadaires autour du catch et autant de goodies. C’était une économie très florissante. À certains moments de son histoire, le catch féminin nippon a même dépassé en popularité le masculin.

BD-AIX : Dans les combats, le storytelling est extrêmement important. Y vois-tu des similitudes avec le manga et la bande dessinée ?

I.M. : Énormément ! La plus flagrante des similitudes, c’est que la bande dessinée, le manga et le catch ont la même finalité : raconter une histoire ! À chaque art, ses outils narratifs pour faire monter le crescendo dramatique. Avec ma compagne, nous avons vu, lors de notre voyage au Japon, un show de la fédération de catch DDT (Dramatic Dream Team). Elle ne s’intéresse pas du tout au catch, mais la narration des combats était tellement efficace et l’ambiance dans la salle tellement folle qu’elle a été prise dans l’histoire que les lutteurs racontaient et s’est mise à encourager le combattant en difficulté.

BD-AIX : Dans ton travail, on retrouve certains des plus grands catcheurs nippons – filles, garçons, toutes périodes confondues. Comment les as-tu choisis ?

I.M. : La plupart des catcheurs que j’ai choisis viennent des années 80-90, car c’est une période qui me plaît beaucoup. À cette époque, les compagnies de catch étaient très nombreuses, et elles redoublaient d’efforts pour attirer le public. L’histoire du catch nippon possède de nombreuses ramifications dignes des meilleures sagas de Shōnen !

Extrait du journal "Puroresu à Kumamoto" - double-page intérieure
Extrait du journal "Puroresu à Kumamoto" - double-page intérieure

BD-AIX : Qui est Antonio Inoki à qui tu dédies ton travail ?

I.M. : Antonio Inoki est l’une des plus grandes icônes du catch nippon. C’est le fondateur de l’une des plus grandes fédérations du monde : la New Japan Pro wrestling. Inoki était aussi obsédé par le combat « réel » ; il a défié, et battu, de nombreux pratiquants d’arts martiaux et a affronté le légendaire Muhammad Ali, dans le premier combat officiel d’arts martiaux mixtes. Il faut savoir que les catcheurs au Japon sont les pionniers du MMA.

Si j’ai dédié ma fresque à ce héros national c’est parce qu’il représente, pour beaucoup, la quintessence du dépassement de soi face à l’adversité. Cette réputation fut telle que beaucoup de fans demandaient à se faire frapper par Inoki au visage avec sa fameuse claque. La légende veut qu’elle donne du courage ! Par la suite, il est devenu homme politique et a mené des négociations pour le rapatriement des otages japonais détenus en Irak. Afin d’apaiser les tensions entre le Japon et la Corée du Nord, il a aussi organisé à Pyongyang le plus grand show de catch qui n’a jamais été fait. Il y avait plus de 100 000 spectateurs ! Lorsque j’ai appris sa mort, j’ai souhaité lui rendre hommage pour tout ce qu’il a légué au catch, au Japon et à l’humanité.

BD-AIX : Graphiquement, de quoi t’es-tu inspiré pour imaginer la forme de ton journal ?

I.M. : J’ai ramené de mon voyage au Japon beaucoup de livres et surtout beaucoup de magazines autour du catch. Je suis fasciné par le nombre incroyable de publications sur ce sujet. Pour la réalisation du journal, je me suis inspiré de l’hebdomadaire Pro-wrestling weekly. (J’aurais tellement voulu avoir ce magazine en France.)

Extrait du journal "Puroresu à Kumamoto" - quatrième de couverture
Extrait du journal "Puroresu à Kumamoto" - quatrième de couverture

BD-AIX : Tu imagines un combat fictif entre Antonio Inoki et Kumamon, la célèbre mascotte de la préfecture de Kumamoto. D’où te vient cette idée ?

I.M. : Comme je le disais précédemment, Antonio Inoki a défié de nombreuses personnes (il a même défié publiquement Amin Dada, l’ancien dictateur de l’Ouganda). L’idée qu’Inoki puisse être capable de défier la mascotte de Kumamoto est à peine tirée par les cheveux. (Et ça me fait beaucoup rire 😊.)

BD-AIX : Beaucoup d’enfants adorent ton travail, qu’est-ce que tu aimerais leur faire découvrir du Japon ?

I.M. : Le catch japonais bien sûr ! Je suis sûr que cette discipline plairait à beaucoup de lecteurs de mangas.

BD-AIX : Heddi Karaoui, catcheur français originaire d’Aix-en-Provence, a déjà affronté des catcheurs japonais. Est-ce que tu l’as déjà rencontré ?

I.M. : Jamais mais j’aimerais tant. J’ai découvert le parcours de ce jeune homme il y a peu et c’est très impressionnant. Il est originaire d’Aix-en-Provence et a quitté la ville pour faire carrière dans la lutte et le catch. Il est parti aux États-Unis et au Japon pour se former auprès des plus grands, dont le grand Antonio Inoki. Il a catché dans des fédérations internationales et maintenant il vit de son art au Mexique. J’espère qu’un jour notre ville mettra en avant son parcours incroyable.

Pour retrouver le journal Puroresu à Kumamoto en ligne, ou le recevoir directement par courrier en version papier, rendez-vous dans le Kiosque BD-AIX.